Club TGS France

Saison

16

Retour vers demain : en quoi l’intelligence artificielle peut-elle révolutionner nos usages et pratiques ?

Synthèse de la conférence

Notre 4ème et dernière conférence de la saison


Vision Prospective

Retour vers demain : en quoi l’intelligence artificielle peut-elle révolutionner nos usages et pratiques ?

16/05 Lille   23/05 Nantes   30/05 Le Havre   13/06 Angers

 

Compte Rendu

Depuis son acte de naissance dans les années 50, l’IA s’est donnée comme mission de reproduire, sinon dépasser de manière logicielle, les différentes facettes de l’intelligence humaine : de la plus rationnelle (jouer au Go) à la plus animale (distinguer un chien d’un chat sur une image).

L’évolution récente la plus impressionnante de l’IA est sa capacité par sa force brute de trouver des solutions innovantes à des problèmes complexes : diagnostic médical, gestion économique, traduction, génie industriel, traitement des médias etc…

L’IA n’est pas qu’un sujet technologique, elle doit d’abord être abordée sous un prisme humain parce qu’elle touche à tout et passe par des processus apprenants. Loin de remplacer l’humain, elle peut lui faciliter la vie et lui permettre de faire plus vite et mieux.
 
L’IA serait même une source d’inspiration quasi infinie grâce à sa capacité à intégrer, analyser, comparer, corréler.

Nous sommes un peu à la croisée des chemins (c’est pour cela que nous osons parler de révolution) :

•    Soit nous trouvons les conditions de réussite d’une collaboration vertueuse homme/machine
•    Soit nous subissons ce qui se passe avec un risque de perte de vitesse et de déclassement.

 

 

Retour sur l’intervention d’Hugues Bersini, Directeur du laboratoire d'Intelligence Artificielle, IRIDIA, de l'Université Libre de Bruxelles, Membre de l'Académie Royale de Belgique

Extrait de la conférence

Synthèse intégrale et support disponibles dans l’espace membre

 

Un peu d’histoire

Nous sommes en 1950, Maître Alan Turing sur  son  génie  perché  n’a  pas  encore  subi  l’horrible «traitement de faveur» que l’on réservait aux homosexuels à cette époque.

Il a trente-huit ans, sa créativité est au zénith et encore inimaginable est le morceau de pomme empoisonnée qui mettra fin à ses jours. Autour de lui, et grâce à lui, de nombreux chercheurs prennent conscience qu’un ordinateur, dénommé par le maître  «machine  universelle»,  pourrait,  par  son  câblage  et  sa  programmation, produire le type de processus cognitif dont jusqu’à présent les humains se réservaient la primeur.

À l’instar d’une forêt neuronale inextricable d’où jaillissent souvenirs, prévisions, inférences  et  raisonnement,  les  mêmes  souvenirs,  prévisions,  inférences  et  raisonnements  pourraient jaillir d’une forêt inextricable, mais cette fois de transistors en silicium et de portes logiques.

Ce cerveau  machine, Turing  l’ambitionne  aussi  infiniment  programmable  que  l’est  notre  cerveau, dont les mêmes neurones se voient sollicités pour des tâches cognitives d’une variété infinie.

Entre deux marathons dont les photos d’époque témoignent, il perce le mystère de ces niveaux empilés d’abstraction  qui  font  de  l’informatique  aujourd’hui  la  technologie  la  plus  extraordinaire,  la  plus envahissante et la plus déconcertante jamais produite par l’humain : machine universelle, machine à tout faire, universellement programmable et universellement intelligente.

Quand on l’interroge sur sa définition de l’intelligence dès lors que c’est d’ordinateur qu’il s’agit (il faudra attendre la conférence de Darthmouth en 1956 pour que le terme « intelligence artificielle » prenne vraiment son envol), il se trouve à ce point dépourvu qu’il s’en tire par une pirouette : plutôt qu’une définition, c’est un test qu’il propose, que dit-on un test, une performance (...)

 

 

Les deux IA : inconsciente et consciente

Ainsi, pour de nombreux types de tâches cognitives que les logiciels aujourd’hui  réussissent  très  décemment  et  même  avec  tous  les  honneurs  (comme  les  jeux  de société,  la  conduite  automobile  et  la  traduction),  il  existe  en  effet  deux  manières  très  différentes d’accomplir  ces  tâches. 

La  première  que  nous  taxerons  « d’inconsciente »,  c’est-à-dire  sans  réelle explicitation  de  l’expertise  humaine,  sans  règle,  sans  nul  besoin  de  décomposer  la  tâche  pour  la simplifier  et  la  soumettre  au  jugement  humain,  offre  une  très  large  place  à  l’apprentissage.  Cet apprentissage  s’effectue  soit  au  départ  de  myriades  de  réalisations  humaines  passées,  soit  par simples essais/erreurs, conduisant graduellement à des logiciels qui se complexifient et s’opacifient d’autant. 

On qualifiera la deuxième de « consciente ». Cette fois, l’expertise humaine reste toujours de mise, essentielle, la tâche se trouvant décomposée et découpée en séquences pour y glisser justement  cette  expertise.  

Cette  IA-là  est  à  l’origine  d’algorithmes  dont  la  transparence  et  la  patte humaine permettent encore et dans une large partie d’en comprendre le fonctionnement. C’est la bonne  vieille IA  d’alors,  qui  ne  pouvait  se  passer  complètement  de  nous ;  mieux  encore,  qui gagnait en rapidité et en performance lorsqu’elle suivait le guide. 

Malgré le succès croissant et l’engouement de plus en plus marqué au vu des performances décoiffantes de l’IA inconsciente, il n’en reste pas moins que cette tension entre les deux IA est vieille comme l’intelligence artificielle elle-même. (...)

 

Méfions-nous de l’IA inconsciente

L’IA inconsciente gagne chaque jour, chaque heure, chaque microseconde davantage en autonomie. Elle doit une large part de son succès à la puissance de nos ordinateurs, leur parallélisme croissant, tel le recours aux cartes graphiques plutôt qu’aux processeurs classiques, ou l’utilisation de clusters (et demain l’ordinateur quantique ?). 

À même d’éviter de plus en plus les ruptures évoquées précédemment, elle n’a plus jamais recours à l’introspection, à s’interroger sur son comportement, ses productions et à solliciter le  cas  échéant  notre  expertise,  aussi  modeste  soit-elle.  Nous  vivons  en  ce  moment  un  véritable paradoxe.  

Chez  nous,  la  complexité  et  le  caractère  inhabituel  des  situations  à  affronter  nous obligent  à  sortir  de  nos  bien  confortables  recettes  inconscientes,  à  nous  servir  péniblement  de notre conscience à la recherche de nouvelles solutions (par la simplification ou la découpe du problème, la recherche de situations quelque peu analogues). 

En IA, ce même type de situation incite à contourner toute explicitation biaisante et peu satisfaisante, afin de s’en remettre au seul apprentissage, l’essai/erreur, et à la compilation de myriades d’expériences humaines ayant dû précédemment affronter ces problèmes. 

Restons pourtant vigilants. Malgré ce que beaucoup aimeraient penser, fournir des données brutes à un algorithme pour lui faire apprendre une tâche n’a rien de vraiment objectif. Il est rassurant de penser que le processus d’apprentissage machine pourrait supprimer les biais que le programmeur met naturellement dans un programme qu’il fabriquera « à la main », de par les choix techniques et logiques qu’il doit opérer durant sa conception. 

En fait, il n’en est rien ; on a plus que souvent simplement  déplacé  le  problème  du  biais  du  concepteur  aux  données  d’apprentissage.  (...)

 

L’IA : Ultime recours face à un monde devenu trop complexe 

Le monde est devenu bien trop complexe pour en confier la gestion aux seuls gouvernants en chair et en os. Les lourds nuages noirs chargés d’orage qui nous menacent, comme :


•    l’économie mondialisée et les crises qui s’ensuivent régulièrement, 
•    l’explosion des inégalités, 
•    le réchauffement climatique et la dégradation de l’environnement, 
•    la détérioration de l’habitat, la transition énergétique inéluctable, 
•    l’agriculture qui s’intensifie en tout sauf en bienfaits pour la santé, 
•    les fractures communautaires et la flambée du terrorisme, 


exigent une meilleure compréhension et interprétation des phénomènes, suivies de délibérations approfondies pour en trouver les parades et les issues.

De son côté, l’IA – meilleur joueur d’échecs, meilleur joueur de go, champion de poker, du jeu télévisé Questions pour un champion, conducteur irréprochable, médecin infaillible, meilleur prévisionniste des soubresauts économiques et des variations climatiques, traducteur le plus sollicité, meilleur décideur – est capable, par sa boulimie de données multiples à très haute fréquence d’acquisition et son pouvoir de simulation pour en faire sens, d’appréhender ce monde, son évolution et les meilleures façons de le remettre sur les rails. 

Cette même IA, que l’on magnifie ces jours-ci de super-intelligente et qui, de surcroît, s’immisce dans tous les recoins de nos existences, est capable d’explorer, à partir de ces simulations, ces états des lieux d’une précision encore jamais atteinte, les manières les plus efficaces d’affronter l’ensemble de ces difficultés et d’en découvrir les remèdes les plus appropriés. (...)

 

Pour revoir l’interview d’Hugues Bersini

 

 

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